Snowpixel, Stable Diffusion, MidJourney, depuis quelques semaines, mois, années, la popularité de ces Intelligences Artificielles capables de produire avec des mots clés et un paramétrage subtil, des images impressionnantes de réalisme pour peu qu’on prenne le temps de bien comprendre comment elles fonctionnent, ne cesse d’enfler.
Encore récemment, une création faites grâce à une IA a obtenu le premier prix lors d’un concours comme le raconte cet article du New York Times (mais vous trouverez facilement de nombreuses autres sources). Si l’on ne peut pas exclure un gros effet de mode qui fait que tout le monde se jette sur ces nouveaux jouets, gratuits pour la plupart, on ne peut pas occulter l’impact qu’aura ce type de logiciel sur tout un pan du métier de graphistes.
En effet les premiers effets se font déjà sentir. Des couvertures de livres sont faites grâce aux AI, des graphistes perdent des contrats pour des images de remplissage au profit des AI, beaucoup moins chères et plus rapides. Est-ce inexorable ? Est-ce inéluctable ?
Non, et voici pourquoi : Tout d’abord sur un point de vue purement technique, ces applications, peu importe leur degrés de réalisme et la qualité de leurs images, ne créent rien. Elles se contente de compiler et de mélanger des images prises sur le Net, au mépris absolu de la propriété intellectuelle dont d’ailleurs la plupart des pays autres que la France ne font pas grand cas. Cela se voit dans certaines images produites par les IA où l’ont peut voir le texte des images utilisées, voir les signatures de l’artiste. Même si vous publiez dans un pays qui ne condamne pas cette façon d’utiliser une image, je ne donne pas cher de la réputation de l’éditeur ou du publicitaire qui se retrouverait en flagrant d’élit d’utiliser un vulgaire patchwork fondu au plastique de véritables œuvres, voir des images de leurs concurrents.
Ensuite d’un point de vue plus émotionnel, mais en partant toujours du même point, l’AI ne crée rien. Si on ne lui demande rien, elle ne fait rien, ce qui est à peu prêt l’inverse d’un artiste. L’AI n’a pas besoin de créer pour exprimer ce qui remue au fond d’elle, elle n’a pas d’émotion, pas de style personnel, et surtout elle n’est pas consciente ni d’elle-même, ni du monde qui l’entoure. Or ceux qui regardent les images ne sont pas des IA, et si leur imagination peut bien se greffer sur le produit d’une machine, ils cherchent toujours l’originalité, ce qui est exactement l’inverse de ce que produisent les AI, à savoir une bouillie cosmétique régulée par un algorithme et des chiffres.
Le jour où nous auront des AI pensantes, oui, l’artiste humain aura du souci à se faire, et encore. Car après tout, les machines tendent toujours vers le geste parfait, qui une fois trouvé sera répété encore et encore, alors que l’art tire sa force d’une perpétuelle remise en question, de l’application tordues de règles préétablies, du choix volontaire de l’imperfection, de la vacuité et du refus de reproduire ce qui a été fait, ou alors s’impose la reproduction comme un exercice dans lequel on se glisser dans le ressenti de l’artiste originel.
SkyNet peut sûrement détruire l’humanité, mais pas peindre la Joconde.